Point de vue fiscal : Droits successoraux américains – citoyens des États-Unis vivant au Canada (version 2018)

janvier 2018

Numéro 2018-04F

En bref

Si vous êtes un citoyen américain vivant au Canada, vous pourriez être assujetti à la fois aux régimes fiscaux canadien et américain à votre décès.

Réforme fiscale américaine : Le 22 décembre 2017, le président Donald Trump a promulgué la Tax Cuts and Jobs Act (TCJA). Les changements comprennent la majoration des montants d’exonération fédérale des droits successoraux et de l’impôt sur les dons de 5,6 M$ à 11,2 M$ pour 2018 (indexation annuelle). L’augmentation est en vigueur de 2018 à 2025. En 2026, les exonérations reviendront aux montants du régime antérieur à 2018, à moins qu’une loi permanente ne soit adoptée. 

Dans le présent bulletin, tous les montants sont libellés en dollars américains, à moins d’indication contraire. 

En détail

À titre de résident du Canada, vous êtes assujetti à l’impôt sur le revenu canadien au décès. À titre de citoyen américain, vous êtes assujetti aux droits successoraux américains sur la juste valeur marchande de vos actifs mondiaux à la date de votre décès. Vos actifs mondiaux comprennent tous les biens détenus au décès, et ce, peu importe où ils sont situés, et même les biens suivants : 

  • le produit d’une assurance vie, si vous êtes titulaire de la police ou si le produit est payable à votre succession;
  • les régimes enregistrés (p. ex. régime de pension agréé, régime enregistré d’épargne-retraite et fonds enregistré de revenu de retraite);
  • certaines participations dans des fiducies;
  • des options d’achat d’actions.

Êtes-vous un citoyen américain?

Le statut de citoyen américain d’un particulier n’est pas toujours clair. Par exemple, alors qu’un particulier se voit accorder la citoyenneté américaine parce qu’il est né aux États-Unis, un particulier peut aussi être un citoyen américain s’il est né à l’extérieur des États-Unis d’un parent qui, lui, est un citoyen américain. 

Si vous n’êtes pas certain de votre statut, veuillez consulter l’équipe Immigration de PwC Cabinet d’avocats S.E.N.C.R.L./s.r.l.

Taux des droits successoraux américains et montants de l’exonération à vie

Le taux des droits successoraux américains commence à 18 % et il grimpe à 40 % lorsque la valeur de la succession atteint 1 M$. À titre de citoyen américain, vous avez droit à une exonération à vie des droits successoraux.

L’exonération des droits successoraux pour 2018 est de 11,2 M$.1 La Tax Cuts and Jobs Act récemment promulguée a doublé le montant de l’exonération, qui est passé de 5,6 M$ à 11,2 M$. L’augmentation du montant de l’exonération est temporaire et reviendra à son montant initial de 5 M$ (indexation annuelle) à moins qu’une loi permanente ne soit adoptée.

Ceci signifie que, si aucune partie de l’exonération n’a été utilisée au titre de l’impôt sur les dons, aucun droit n’est payable si la valeur de votre succession mondiale ne dépasse pas 11,2 M$ (indexation annuelle). 

Crédits pour impôt étranger

Aux fins de l’impôt canadien, vous serez réputé avoir disposé de vos actifs, à votre décès, pour un montant égal à leur juste valeur marchande à cette date. Par conséquent, vous pourriez payer l’impôt sur les gains en capital au Canada.

De plus, vous serez assujetti aux droits successoraux américains calculés sur la juste valeur marchande de ces biens.

La convention fiscale entre le Canada et les États-Unis (« la convention ») prévoit un certain allègement de la double imposition sous la forme de crédits pour impôt étranger. Selon la convention, le Canada accorde un crédit fédéral au titre des droits successoraux américains payables sur vos biens qui sont situés aux États-Unis. Les États-Unis accordent un crédit au titre de l’impôt sur le revenu canadien payable au décès sur la disposition réputée de vos biens qui sont situés à l’extérieur des États-Unis, comme le montre l’exemple suivant :

Jean est un citoyen des États-Unis qui vit au Canada. Il est célibataire et, à son décès, il détenait un portefeuille de titres canadiens ayant une juste valeur marchande de 100 000 $CA, qu’il avait acheté au prix de 25 000 $CA. 

La succession de Jean sera assujettie à l’impôt canadien sur le gain en capital accumulé de 75 000 $CA et elle sera également assujettie aux droits successoraux américains sur le portefeuille de titres de 100 000 $CA. 

La convention permet à Jean de réduire ses droits successoraux américains du montant de l’impôt canadien payé sur le gain en capital accumulé de 75 000 $CA. 

Votre succession paiera donc généralement le plus élevé des deux impôts. Comme l’impôt canadien sur les gains en capital est moins élevé que les droits successoraux américains, votre succession paiera vraisemblablement l’impôt au taux des droits successoraux américains. Il y a un élément de double imposition parce que le crédit pour impôt étranger n’est offert qu’au fédéral.

Déduction et crédit pour conjoint

À titre de résident canadien, vous pouvez transférer vos actifs à votre conjoint résidant au Canada sur une base de roulement, à votre décès. Ainsi, vous pouvez reporter le paiement de l’impôt sur le revenu canadien jusqu’au décès de votre conjoint. 

Aux fins des droits successoraux américains, un roulement n’est permis que si votre conjoint est un citoyen des États-Unis. C’est ce que l’on appelle aux États-Unis la déduction pour conjoint (« marital deduction »). Si votre conjoint n’est pas un citoyen des États-Unis, cette déduction n’est pas disponible, sauf si le legs est effectué par l’intermédiaire d’une fiducie dite « Qualified Domestic Trust » (« QDOT »). 

Par ailleurs, la convention prévoit un crédit pour conjoint à porter en diminution des droits successoraux, si certaines conditions sont réunies. Le crédit pour conjoint permet à un citoyen des États-Unis de doubler effectivement le montant qui peut être transféré au conjoint canadien en franchise des droits successoraux américains. Par exemple, si Jean décédait en 2018 et laissait un conjoint survivant qui n’est pas citoyen des États-Unis, il pourrait lui léguer près de 22,4 M$ d’actifs sans que sa succession soit assujettie aux droits successoraux américains (c.-à-d. doubler l’exonération à vie de 11,2 M$ mentionnée plus haut). 

Exonération à vie inutilisée 

Toute partie de l’exonération à vie du défunt de 11,2 M$ (indexation annuelle) qu’il n’a pas utilisée dans le passé, peut l’être par la succession du conjoint survivant. Pour profiter de cette « transférabilité » de l’exonération : 

  • le conjoint survivant doit être un citoyen américain ou un résident des États-Unis; et
  • le liquidateur de la succession du premier conjoint à mourir doit produire un choix en vue du transfert de l’exonération inutilisée au conjoint survivant.

Le choix doit être produit à temps, même si la succession n’est pas tenue de produire une déclaration de droits successoraux. 

Production d’une déclaration de droits successoraux

Généralement, même si aucun droit n’est exigible, vous devez produire une déclaration de droits successoraux américains :

  • si la valeur de votre succession mondiale excède le montant de l’exonération pour l’année; 
  • pour faire le choix de transférer la partie inutilisée de l’exonération au conjoint survivant.

La déclaration doit généralement être produite dans les neuf mois suivant le décès.

Impôt américain sur les dons

Vous ne pouvez éviter les droits successoraux américains en faisant don de vos biens de votre vivant, car les États-Unis lèvent aussi un impôt sur les dons sur les transferts effectués de votre vivant. L’impôt sur les dons est combiné aux droits successoraux, de sorte que l’impôt sur les dons est levé au même taux que les droits successoraux et prévoit la même exonération de 11,2 M$ (indexation annuelle). 

Toutefois, comme il en a été question précédemment, si vous utilisez l’exonération de l’impôt sur les dons, votre exonération des droits successoraux diminuera du montant correspondant. L’impôt sur les dons s’applique à tous les types de biens, peu importe où ils sont situés.

Les dons effectués en faveur de votre conjoint qui est citoyen américain ne sont pas assujettis à l’impôt sur les dons. Toutefois, si votre conjoint n’est pas un citoyen des États-Unis, vous serez assujetti à l’impôt sur les dons si le montant annuel des dons à votre conjoint en 2018 est supérieur à 152 000 $ (indexation annuelle).

De plus, vous avez droit à une exclusion annuelle de 15 000 $ (indexation annuelle) pour les dons effectués à toute personne autre que votre conjoint. À titre d’exemple, si vous avez quatre enfants, vous pouvez donner jusqu’à 60 000 $ à vos enfants en 2018 sans être assujetti à l’impôt américain sur les dons. 

Vous ne serez pas tenu de produire une déclaration d’impôt sur les dons et le don de 60 000 $ ne réduira pas votre exonération à vie de l’impôt sur les dons et des droits successoraux. 

Si vous et votre conjoint êtes tous deux citoyens américains, vous pouvez doubler votre plafond annuel de dons en acceptant de les fractionner. Dans ce cas, toutefois, vous et votre conjoint serez tenus de produire une déclaration américaine d’impôt sur les dons. Ces règles sont illustrées dans le tableau qui suit :
 

Bénéficiaire Exclusion annuelle
Conjoint citoyen des États-Unis Pas d’impôt sur les dons
Conjoint qui n’est pas citoyen des États-Unis

152 000 $1

Tous les autres bénéficiaires 15 000 $ par bénéficiaire1

1.  L’utilisation de votre exclusion annuelle n’a pas d’incidence sur votre exonération à vie au titre des droits successoraux et de l’impôt sur les dons. Les exclusions annuelles sont indexées annuellement

Impôt américain sur les transferts qui sautent une génération

L’impôt sur les transferts qui sautent une génération (« Generation-Skipping Transfer Tax ») s’applique à certains transferts effectués en faveur d’une personne qui est au moins deux générations plus jeune que le cédant – un petit-fils ou une petite-fille, par exemple. Le taux de cet impôt américain est de 40 % et une exonération de 11,2 M$ (indexation annuelle) est prévue. 

Cet impôt sur les transferts à un petit-enfant ou un arrière-petit-enfant s’ajoute à l’impôt sur les dons applicable, ce qui empêche effectivement les particuliers de transférer des biens à une telle personne pour éviter la génération de droits successoraux. 

L’impôt américain sur les transferts qui sautent une génération peut aussi s’appliquer à une fiducie familiale qui inclut un petit-enfant ou un arrière-petit-enfant. Par exemple, il est courant au Canada de laisser des biens en fiducie pour des enfants et des petits-enfants. Dans ce cas, la personne décédée pourrait avoir à attribuer son exonération de 11,2 M$ de cet impôt à la fiducie pour empêcher l’application de l’impôt sur les transferts qui sautent une génération parce que les biens pourraient revenir à un petit-fils ou une petite-fille à une date future. 



[1].  L’American Taxpayer Relief Act of 2012 établit un montant d’exonération de 5 M$ et indexe ce montant sur l’inflation annuellement. L’Internal Revenue Service (IRS) a annoncé que le montant d’exonération indexé est de 5,60 M$ pour 2018. La Tax Cuts and Jobs Act a doublé le montant d’exonération initial, qui est passé de 5 M$ à 10 M$, indexé à 11,2 M$ pour 2018.
 

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Martin Olivier Boiteau

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Jean-François Thuot

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