Projets de Normes canadiennes d’information sur la durabilité

14/03/24

Sarah Marsh, associée et leader nationale, Rapports et certification ESG
Scott Morrison, associé, Rapports et certification ESG et durabilité
Jennifer Lawson, directrice principale, Rapports et certification ESG

Normes canadiennes d’information sur la durabilité

De nouvelles normes d’information sur la durabilité prennent forme au Canada.

Le Conseil des normes internationales d’information sur la durabilité (International Sustainability Standards Board – ISSB), qui relève de l’IFRS Foundation, a adopté une base de référence sur la présentation d’informations sur la durabilité en juin 2023. Ces normes, soit les normes IFRS S1 et IFRS S2, visent à favoriser l’uniformité et la comparabilité des informations sur la durabilité destinées aux investisseurs et autres utilisateurs des informations sur la durabilité publiées par les sociétés.

Le Conseil canadien des normes d’information sur la durabilité (CCNID) a pour mission d’élaborer un référentiel canadien fondé sur les normes de l’ISSB. Le 13 mars 2024, le CCNID a publié pour commentaires ses deux premiers projets de normes qui, s’ils sont approuvés, constitueront les premiers éléments de ce nouveau référentiel, soit les Normes canadiennes d’information sur la durabilité (NCID). Il s’agit, plus précisément, de la NCID 1 Obligations générales en matière d’informations financières liées à la durabilité et de la NCID 2 Informations à fournir en lien avec les changements climatiques. De plus, le CCNID a publié un document de consultation énonçant les critères qui permettront de déterminer s’il convient d’ajouter ou de supprimer du texte, ou encore d’apporter d’autres modifications aux dispositions reprises des Normes IFRS d’information sur la durabilité.

Bien qu’elles s’alignent largement sur les normes IFRS S1 et IFRS S2, la NCID 1 et la NCID 2 contiennent des dispositions propres au Canada, notamment ce qui suit :

  • La date d’application anticipée facultative des deux normes est reportée d’un an, passant du 1er janvier 2024 au 1er janvier 2025.
  • L’allègement transitoire proposé concernant les informations à fournir autres que celles portant sur les possibilités et risques liés aux changements climatiques sera d’une durée de deux ans plutôt que d’un an, comme le prévoyait l’ISSB. Ainsi, les entités qui adopteront volontairement les NCID le 1er janvier 2025 seront tenues de fournir des informations sur l’ensemble des possibilités et risques liés à la durabilité à partir de la période commençant le 1er janvier 2027.
  • L’allègement transitoire proposé concernant les informations à fournir sur les émissions de gaz à effet de serre (GES) du champ d’application 3 sera d’une durée de deux ans plutôt que d’un an, comme le prévoyait l’ISSB. Ainsi, les entités qui adopteront volontairement les NCID le 1er janvier 2025 seront tenues de fournir des informations sur leurs émissions de GES du champ d’application 3 à partir de la période commençant le 1ᵉʳ janvier 2027.

Les commentaires sur les exposés-sondages doivent être transmis d’ici le 10 juin 2024.

L’optique des autorités de réglementation

Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ont publié un communiqué de presse1 dans lequel elles se disent ravies du lancement de la consultation par le CCNID et intéressées par les commentaires que recevra le CCNID en réponse à des questions spécifiques posées dans les exposés-sondages.

Les ACVM précisent par ailleurs ce qui suit :

Pour être exécutoires en vertu de la législation canadienne en valeurs mobilières, les normes du CCNID doivent d’abord être intégrées dans un règlement des ACVM. Lorsque le CCNID aura mis fin à sa consultation et parachevé ses normes, les ACVM entendent solliciter des commentaires sur un projet de règlement révisé qui établirait des obligations d’information liées au changement climatique. Le projet des ACVM prendra en considération la version définitive des normes du CCNID et pourrait inclure des ajustements jugés nécessaires pour les marchés des capitaux canadiens. Les ACVM comptent adopter seulement les dispositions des normes sur la durabilité requises pour appuyer la présentation d’information liée au changement climatique. (…) Quand les ACVM publieront leur projet de règlement révisé, elles chercheront à obtenir les commentaires du public sur un certain nombre de questions, notamment le champ d’application et le temps ou les indications supplémentaires qui pourraient être nécessaires aux émetteurs assujettis pour se conformer à certaines obligations d’information.

Même si les sociétés pourront adopter volontairement les normes du CCNID lorsqu’elles seront définitives, la réglementation sera également extrêmement importante pour déterminer comment ces normes seront effectivement appliquées au Canada. Nous nous attendons à ce qu'il y ait davantage de discussions sur la façon dont convergeront les aspects normatifs et réglementaires. Il est toutefois certain que, au cours du processus d’établissement des NCID, les sociétés canadiennes doivent se faire entendre, autant auprès du CCNID que des autorités de réglementation.

Une tendance mondiale se dessine vers la présentation obligatoire d’informations sur la durabilité, et il est peu probable que les sociétés ouvertes canadiennes échappent à une quelconque forme d’obligations d’information. Les sociétés doivent donc continuer à se préparer en vue de satisfaire à ces nouvelles obligations.


Possibilités et risques liés à la durabilité :
quelles informations doivent être fournies?

• Les possibilités et risques propres à votre organisation, classés en ordre d’importance.

• Une description des possibilités et des risques propres à votre organisation, et de leur incidence à court, moyen et long terme sur votre modèle économique et votre chaîne de valeur.

• Des informations qualitatives et quantitatives sur les incidences des possibilités et des risques liés à la durabilité sur la situation financière, la performance financière et les flux de trésorerie de votre organisation à court, moyen et long terme.

• Les plans d’action que vous comptez prendre à l’égard de ces possibilités et risques, vos progrès accomplis par rapport à ces plans et les compromis que vous avez envisagés.

Comment les sociétés canadiennes doivent-elles se préparer en vue des NCID

Les sociétés qui choisiront d’appliquer les NCID ne pourront pas se contenter d’affiner les informations déjà présentées pour s’y conformer. Il leur faudra repenser leurs processus d’information pour bien cerner leurs axes prioritaires, en déterminer l’importance relative (ou significativité) et recueillir les données nécessaires.

Voici quelques éléments à inclure dans votre stratégie :

  • Évaluation des lacunes des informations présentées. Déterminer comment les informations que vous présentez déjà sur la durabilité se comparent à celles exigées par les NCID. Vous découvrirez peut-être des lacunes, non seulement dans vos informations, mais aussi dans vos données et processus internes sous-jacents. Par exemple, une société pourrait déjà présenter des informations sur ses émissions des champs d’application 1 et 2, mais pourrait ne pas tenir compte de l’organisation dans son ensemble, comme l’exige la NCID 2. Par conséquent, cette lacune sur le plan des informations pourrait révéler une lacune sous-jacente du processus de collecte des données à laquelle il faudra remédier pour se conformer aux NCID. Une fois les lacunes sur le plan de l’information relevées, les équipes responsables de la présentation des informations et de l’exploitation pourront travailler ensemble à la conception des processus nécessaires pour obtenir les données requises afin de répondre aux exigences des NCID.
  • Réalisation ou actualisation de l’appréciation de l’importance relative (ou significativité). Nous pensons qu’un grand nombre de sociétés devront réaliser ou actualiser leur appréciation du caractère significatif pour pouvoir comprendre quelles informations sont significatives pour chaque possibilité et risque. Dans cette optique, il sera essentiel de dialoguer avec vos parties prenantes, et plus particulièrement vos investisseurs, pour savoir quelles informations elles jugent significatives. Prenons un exemple : une société peut avoir réalisé, par le passé, des appréciations du caractère significatif des sujets et relevé la question de l’utilisation de l’eau. Selon la NCID 1, une société doit réaliser une appréciation du caractère significatif des informations. Une telle appréciation nécessite l’acquisition d’une compréhension des possibilités et risques associés à un sujet donné. Dans l’exemple susmentionné, la société peut avoir relevé l’incidence de la rareté potentielle de l’eau dans la localité. Cela pourrait présenter un risque si les lois et règlements sur la consommation d’eau venaient à être modifiés. Plus précisément, il pourrait en découler des conséquences financières en raison du coût potentiel de la conformité aux nouveaux règlements ou de l’obtention de permis.
  • Examen du périmètre de présentation des informations. Pour fournir des informations conformes aux NCID, il ne faut pas tenir compte uniquement de la société et de ses filiales : il faut également considérer l’incidence des possibilités et risques liés à la durabilité dans la chaîne de valeur — en amont et en aval — sur le modèle économique et sur les perspectives de l’organisation. Un tel exercice peut nécessiter l’adoption d’une approche très différente dans les sociétés habituées à se concentrer exclusivement sur leur groupe consolidé aux fins de la présentation de l’information financière. Par exemple, un fabricant de pièces d’auto prenant de l’expansion dans le marché des pièces de véhicules électriques pourrait considérer les risques en amont, comme les interruptions dans sa chaîne logistique causées par des tensions géopolitiques, qui pourraient nuire à son approvisionnement en minerais critiques. Le fabricant pourrait aussi déceler des possibilités en aval, comme une collaboration avec des organisations faisant le recyclage des matières provenant des batteries arrivées à la fin de leur vie utile.
  • Intégration du concept de durabilité dans le processus global de gestion des risques. Les sociétés doivent explorer différents moyens d’intégrer l’identification et la surveillance des opportunités et risques liés à la durabilité dans leur processus de gestion des risques d’entreprise. Bon nombre d’entre elles évaluent déjà la probabilité que certains risques se réalisent et l’ampleur de leur exposition à ces risques. Les organisations doivent maintenant adopter la même approche quant aux possibilités et risques liés à la durabilité. Par exemple, une entreprise du secteur de l’hébergement touristique ayant des immeubles riverains pourrait devoir considérer les risques physiques découlant de tempêtes plus fréquentes et violentes ainsi que de la hausse du niveau de la mer. Les investisseurs souhaiteront vraisemblablement savoir si un immeuble pourrait être inondé et comment un tel incident se répercuterait sur les flux de trésorerie de la société en raison de l’augmentation du coût des assurances et des frais d’entretien ainsi que de la perte possible d’actifs.

Bon nombre de sociétés savent qu’elles seront vraisemblablement assujetties à de multiples nouvelles règles, notamment celles découlant de la nouvelle loi canadienne sur l’esclavage moderne, la Directive sur la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises (CSRD) de l’Union européenne et les règles d’information sur le changement climatique de la Californie (PDF), et elles établissent un processus unique de présentation des informations qui leur permettra de satisfaire à toutes ces différentes exigences.

L’adoption des NCID, lorsqu’elles seront définitives, et le respect des exigences de toutes les autres nouvelles règles applicables, représenteront une vaste entreprise, qui exigera que les responsables de la présentation de l’information, de la gestion des risques et de l’exploitation collaborent entre eux. Les sociétés ont beaucoup de pain sur la planche, et elles doivent impérativement commencer à se préparer maintenant.

Créer de la valeur durable grâce à des informations de qualité sur la durabilité

Dans la mesure où, une fois définitives, les NCID seront bien adaptées aux besoins du marché canadien, elles constitueront un pas de plus vers une plus grande uniformité des informations sur la durabilité au Canada. Il est très important que les sociétés canadiennes profitent de la période de commentaires pour se prononcer sur la façon d’adapter au mieux les normes pour le Canada. La modification des dispositions des IFRS d’information sur la durabilité, lesquelles reçoivent partout dans le monde un soutien grandissant de la part des investisseurs, des autorités de réglementation, des agences de notation et d’organismes comme le CDP, ainsi que de différents autres groupes de parties prenantes, sera sans doute plus utile pour les sociétés canadiennes en quête de capitaux sur les marchés mondiaux que ne le serait l’élaboration de normes entièrement nouvelles.

Les sociétés qui sont conscientes des occasions de création de valeur qui découleront de la présentation d’informations sur la durabilité ne tiennent pas seulement compte des normes de l’ISSB et du CCNID dans leurs préparatifs : ces sociétés pionnières se servent des normes d’information sur la durabilité pour améliorer leur performance interne, relevant les gains possibles d’efficience opérationnelle, générant des économies, renforçant leur résilience et améliorant leur accès aux capitaux, ce qui les aidera à remplir leur mission et à demeurer prospères.

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