Comment les acteurs de l’immobilier peuvent-ils créer de la valeur sur un marché montréalais concurrentiel?

À l’instar d’autres villes du pays, l’économie de Montréal est en voie de rétablissement, le Conference Board du Canada prévoyant une croissance du produit intérieur brut de 5 % cette année et de 4,2 % en 2022. Cependant, la concurrence vient accentuer la pression sur le marché immobilier local, ce qui oblige les entreprises à explorer des solutions créatives pour optimiser leurs portefeuilles.

Mises en chantier sur le marché du logement

Du côté résidentiel, le marché des maisons individuelles et jumelées, des maisons en rangée et des condos au centre-ville continue de bien se porter, ce qui contribue à stimuler la construction dans une ville où l’offre de propriétés pour la revente est limitée. Les constructeurs entreprennent des chantiers, et la recherche d’acquisitions est lancée.

L’entrée en vigueur en avril du règlement municipal « 20-20-20 », qui exige que les promoteurs consacrent 20 % des nouveaux bâtiments à du logement social, abordable et familial, a eu un effet de catalyseur sur la construction d’habitations multifamiliales au début de 2021. Ce règlement, qui vient s’ajouter aux pressions sur les coûts de construction et aux incertitudes pour le secteur, pourrait avoir des répercussions sur les activités de promotion immobilière à l’avenir.

 

Des occasions du côté des logements locatifs et des communautés privilégiant le transport en commun

Certains promoteurs se sont tournés vers le marché locatif, et environ 10 000 unités devraient être achevées cette année selon les perspectives du marché de l’habitation publiées au printemps 2021 par la Société canadienne d’hypothèques et de logement. La région de Montréal présente aussi d’autres possibilités, notamment dans les communautés privilégiant le transport en commun, surtout considérant les projets d’infrastructure en cours. Citons par exemple le système léger sur rail du Réseau express métropolitain, projet qui permettra d’étendre le transport en commun rapide à toute la région de Montréal. Les premiers trains devraient commencer à circuler sur une portion du réseau en 2022, et la mise en service des autres sections est prévue pour 2023-2024.

Même si le problème de l’abordabilité n’est pas aussi criant dans notre province qu’ailleurs au pays, les entretiens menés avec des acteurs de l’immobilier québécois pour notre rapport Emerging Trends in Real Estate ont révélé un intérêt croissant, en partie motivé par des programmes d’incitatifs gouvernementaux, pour la construction d’immeubles locatifs et de logements abordables en banlieue. Alors que partout au Canada, les personnes interrogées s’entendent sur la nécessité d’une collaboration accrue entre les gouvernements et les intervenants du secteur pour résoudre le problème de l’abordabilité, certains acteurs au Québec notent que le logement abordable gagne présentement en attrait dans la province, étant donné l’environnement plus favorable comparativement à certaines autres régions du pays.

Tendance à la transformation pour les immeubles de bureaux et le commerce de détail

Une profonde mutation s’opère actuellement dans le segment du commerce de détail. Dans les centres commerciaux, nous voyons de plus en plus de locataires non traditionnels ainsi que des magasins temporaires de produits saisonniers, qui s’ajoutent aux grands locataires comme les épiceries et les pharmacies. Sur le marché des immeubles de bureaux, la transition vers des formules de travail hybride privilégiant la collaboration pousse la plupart des locataires à réaménager leur espace au lieu de réduire la surface occupée. Cette tendance alimente l’optimisme en dépit du fait que, selon CBRE, le taux d’inoccupation des immeubles de classe A au centre-ville est passé à 9,2 % au deuxième trimestre de 2021, contre 8,4 % plus tôt cette année.

Plusieurs personnes interrogées considèrent que le secteur de la biotechnologie et des sciences de la vie est prometteur pour l’immobilier montréalais. Le gouvernement du Canada poursuit sa collaboration avec l’industrie pharmaceutique afin d’assurer l’approvisionnement en produits comme les vaccins, ce qui donne un coup d’accélérateur au secteur et pousse ces entreprises à agrandir leurs locaux.

Composer avec un marché étroit pour les locaux industriels

Les répondants considèrent que, parmi toutes les catégories d’actifs, ce sont les immeubles à usage industriel qui offrent le plus d’opportunités. Malgré tous les efforts des promoteurs pour répondre à la demande, le taux de disponibilité des immeubles à usage industriel est passé sous la barre des 2 % (une première pour Montréal) selon le rapport de Colliers sur le marché industriel au deuxième trimestre de 2021. Citons aussi le faible coût de l’électricité dans la province, qui contribue à y attirer les centres de données, y compris dans la région montréalaise.

Bien que la hausse des loyers suscite un intérêt accru pour les immeubles à usage industriel, la disponibilité limitée des terrains demeure un problème pour les acteurs de l’immobilier, d’où l’exploration par certains de différentes solutions dans ce marché étroit, dont les édifices en hauteur.

 

Plus d’accent sur la diversification et l’optimisation des portefeuilles

Dans l’ensemble, malgré la bonne tenue générale du marché immobilier montréalais, les grandes transformations sectorielles et l’environnement concurrentiel obligeront les entreprises à la recherche d’un meilleur rendement à redoubler de rigueur dans la prise de décision en matière d’investissement et à trouver des moyens de diversifier et d’optimiser leurs portefeuilles. Pour certaines personnes interrogées, cela pourrait passer par la conclusion de petites transactions ou de transactions hors marché.

Dans le segment du commerce de détail, la tendance au réaménagement ne fera que s’amplifier vu les pressions croissantes qui s’exercent sur cette catégorie d’actifs et la volonté des propriétaires de biens immobiliers peu performants de redynamiser leurs activités. Selon certains, ces propriétés gagneraient à être réaménagées pour y loger des installations consacrées à l’entreposage,  au traitement de commandes et à la livraison au destinataire final. D’autres intensifient leurs efforts pour suivre la tendance croissante consistant à combiner les usages commercial et résidentiel en construisant des logements à la place des stationnements, ce qui offre l’avantage supplémentaire d’augmenter l’achalandage des magasins.

Les clés de la création de valeur dans un marché immobilier en évolution

Il sera essentiel de mettre l’accent sur la créativité et de trouver des moyens de s’adapter à ce marché immobilier en évolution, car les signes d’accroissement de la pression sur le secteur sont nombreux. Notre rapport de cette année cite une étude de CIBC Mellon montrant que 42 % des caisses de retraite canadiennes sondées prévoient augmenter leurs investissements dans l’immobilier au cours des 12 à 24 prochains mois. Beaucoup de répondants montréalais ont noté une présence plus marquée, sur le marché québécois, d’investisseurs institutionnels qui cherchent à investir leurs capitaux, ce qui alimente la concurrence. Bien que cette tendance stimule le marché dans son ensemble, il sera important pour les acteurs de l’immobilier montréalais d’examiner de nouvelles opportunités de création de valeur à intégrer dans la planification pour 2022.

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