29 janvier, 2020
Numéro 2020-02F
Le 20 décembre dernier, Revenu Québec rendait publique une nouvelle version du Bulletin d’interprétation ADM. 4 (ADM.4/R8) portant réforme de son programme de divulgation volontaire (PDV). Cette dernière a essentiellement pour effet d’introduire un programme « général » et un programme « limité » à l’image de ce qu’a fait l’Agence du Revenu du Canada (ARC) à l’occasion de sa propre réforme entrée en vigueur le 1er mars 2018.
Cette révision du programme amène donc des resserrements importants. Le fisc n’avait d’autre choix que de resserrer les avantages que pouvait conférer le PDV en certaines circonstances, compte tenu des critiques qui se faisaient entendre sur l’équité des allègements accordés. On se rappellera à cet égard la recommandation numéro 17 de la Commission des Finances publiques de l’Assemblée nationale dans son rapport du 5 avril 2017 sur les paradis fiscaux voulant qu’on « abolisse la divulgation volontaire sauf quand elle se rapporte à des activités faites de bonne foi et impliquant de faibles valeurs ».
Revenu Québec ne se rend pas à cet extrême. La modification centrale consiste en la création d’un programme général et d’un programme limité où les allègements au titre des pénalités et des intérêts sont plus ou moins grands selon que l’on bénéficie de l’un ou l’autre programme. Le programme limité, moins généreux, est celui généralement applicable lorsqu’il existe un élément de conduite intentionnelle de la part du demandeur ou s’il s’agit d’un contribuable sophistiqué.
Le Bulletin d’interprétation indique comme principe important à la base du nouveau PDV qu’il importe que le programme soit équitable, de sorte que les personnes qui en bénéficient soient tout de même traitées plus sévèrement que celles qui respectent leurs obligations fiscales, mais moins sévèrement que celles qui restent délibérément dans une situation de non-conformité. En fonction de ce principe, le PDV est scindé en programme général et en programme limité.
Le programme général qui est institué offre un allègement pour les situations d’inobservation fiscale où il y a absence d’élément de conduite intentionnelle de la part du demandeur ou d’une partie étroitement liée. Si la demande de divulgation est acceptée par Revenu Québec dans le cadre de ce programme, les allègements suivants s’appliqueront :
a) Aux fins du calcul des intérêts, la détermination des années ou périodes prescrites sera faite en fonction de la date d’entrée en vigueur de la divulgation. Cette date est celle de la réception d’une demande de divulgation volontaire dûment remplie et signée.
b) À l’égard des années ou des périodes qui ne sont pas prescrites, l’ensemble des intérêts exigibles seront imposés.
c) À l’égard des années ou des périodes qui sont prescrites, pour les six années civiles (s’il en est) précédant l’année civile au cours de laquelle la divulgation entre en vigueur, 50 % des intérêts exigibles sur les droits additionnels seront imposés.
Le programme limité est celui qui s’appliquera lorsqu’il existe un élément de conduite intentionnelle de la part du demandeur ou d’une partie étroitement liée. À l’instar du régime fédéral, le Bulletin précise qu’en règle générale, les demandes des contribuables plus sophistiqués, ainsi que celles des sociétés ayant des recettes brutes supérieures à 250 millions de dollars pendant au moins deux ans de leurs cinq dernières années et toutes les entités liées, seront examinées dans le cadre du programme limité. Les allègements qui sont accordés sont comme suit :
a) Comme pour le programme général, aux fins du calcul des intérêts, la détermination des années ou périodes prescrites sera fonction de la date d’entrée en vigueur de la divulgation.
b) Pour les années ou périodes qui ne sont pas prescrites, l’ensemble des intérêts exigibles seront imposés.
c) Pour les années ou périodes qui sont prescrites, pour les 10 années civiles (s’il en est) précédant l’année civile au cours de laquelle la divulgation entre en vigueur, 50 % des intérêts exigibles sur les droits additionnels seront imposés.
De plus, à l’égard des années ou des périodes qui sont prescrites et qui sont antérieures à 10 années civiles précédant l’année civile au cours de laquelle la divulgation entre en vigueur, 50 % de l’ensemble des intérêts exigibles sur les droits additionnels seront imposés à partir de la 10e année civile précédant l’année civile au cours de laquelle la divulgation entre en vigueur.
Il n’y a pas de changement important au PDV en ce qui concerne les modalités du programme lorsqu’il s’agit d’opérations de TVQ sans effet fiscal, si ce n’est que le Bulletin qualifie ce type de divulgation volontaire comme constituant une catégorie distincte. Il en est de même pour ce qui est des divulgations se rapportant aux droits sur les mutations immobilières.
Le PDV ne s’appliquera pas à une situation concernant une planification fiscale agressive (PFA), rétroactive ou non, ainsi qu’à celle concernant la production de divulgations préventives ou obligatoires en matière de PFA, notamment pour les cas de trompe-l’œil et d’application de la règle générale anti-évitement.
Les personnes qui ne sont pas certaines de vouloir présenter une demande pourront, de façon anonyme, avoir des discussions préliminaires concernant leur situation afin d’obtenir un aperçu du processus et de l’allègement offert dans le cadre du programme de divulgation volontaire. Ces discussions avec un employé de la Direction principale des divulgations volontaires et du recouvrement international (DPDRI) sont informelles et peuvent avoir lieu avant que l’identité de la personne ne soit révélée. Ces discussions ne signifient pas que la demande de divulgation sera acceptée.
Compte tenu de l’absence de droit d’opposition permettant à une personne de contester une décision prise dans le cadre d’une divulgation volontaire, par exemple si un allègement a été refusé, la personne pourra demander par écrit à la DPDRI qu’elle examine à nouveau sa demande. Le demandeur devra exposer les motifs pour lesquels il croit que la décision est mal fondée et pourra faire des représentations supplémentaires. La DPDRI procédera à la nomination d’un mandataire qui n’a pas participé à l’examen précédent ni à la prise de décision, pour qu’il entreprenne ce deuxième examen.
C’est dire que le PDV de Revenu Québec et celui de l’ARC se trouvent maintenant davantage harmonisés en ce que les allègements qu’ils procurent sont substantiellement réduits, en particulier dans le cadre du programme limité. Toutefois le PDV de Revenu Québec a conservé certaines des grandes particularités qui le distinguaient de son pendant fédéral. Ainsi il ne s’applique généralement pas dans des situations où il n’y a pas de droits payables ou s’il s’agit de choix tardifs ou modifiés. De même, la période au cours de laquelle il est possible de renoncer à des intérêts ou pénalités s’étend à plus de dix ans.