08 mai, 2025
Numéro 2025-21F
Le 28 avril 2025, la Cour d’appel fédérale (CAF) a rendu son jugement dans l’affaire Société d’assurance des entreprises Northbridge c. Le Roi, 2025 CAF 83. La CAF a accueilli l’appel du contribuable, estimant que la Cour canadienne de l’impôt (CCI) avait commis une erreur dans sa décision sur :
C’est la deuxième fois que la CAF annule une décision de la CCI pour ce contribuable. Dans la première affaire, la CAF a conclu que les « risques qui sont habituellement situés au Canada » font référence au lieu où il y a un « risque de réclamation découlant d’un accident (ou d’un autre événement assurable) » et non pas au lieu où se trouvent habituellement les objets qui sont assurés. Cette deuxième affaire traite de la manière dont les CTI doivent être déterminés, la CAF estimant que le calcul des CTI peut être basé sur les deux éléments suivants :
Pour la deuxième fois, l’affaire a été renvoyée à la CCI afin de déterminer le montant des CTI que le contribuable est en droit de demander.
Ces affaires confirment que les assureurs résidant au Canada qui assurent des biens meubles corporels (par exemple, des véhicules, des avions, des wagons, etc.), pour lesquels une réclamation peut être présentée à la suite d’un accident ou d’un événement survenu à l’étranger, doivent être considérés comme fournissant une assurance détaxée. Par conséquent, ils pourraient demander des CTI sur les dépenses, dans la mesure (exprimée en pourcentage) où les dépenses sont engagées pour effectuer ce type de fourniture détaxée.
Les assureurs résidant au Canada doivent déterminer la mesure dans laquelle ils effectuent des fournitures d’assurance détaxées et adopter une attribution des CTI juste et raisonnable. Pour justifier le montant des CTI qui peuvent être demandés sur les frais généraux (par exemple, les intrants directs, les intrants non attribuables et les immobilisations), les assureurs doivent conserver des preuves sur le mode de tarification des polices d’assurance et la partie des primes d’assurance qui est attribuable à un risque de réclamation découlant d’un événement qui se produit à l’étranger.
Le contribuable, une compagnie d’assurance résidant au Canada, établit des polices d’assurance de parc automobile pour des sociétés de camionnage qui exploitent leurs véhicules à la fois au Canada et aux États-Unis (É.-U.). Ces polices couvrent le parc de camions et de remorques d’une société en cas d’accidents et d’autres événements assurables, y compris lorsque les véhicules circulent aux É.-U. Les primes payées au contribuable sont calculées annuellement, sur la base de sa meilleure estimation des pertes potentielles applicables à chaque police (calcul des pertes). Les principaux facteurs utilisés pour déterminer les primes comprennent le calcul des pertes, le coût moyen par sinistre et le kilométrage parcouru dans les différentes juridictions.
Dans le cadre de ses activités d’assurance, le contribuable engage diverses dépenses sur lesquelles il paie la TPS/TVH. Il avait demandé des CTI pour recouvrer 33,3 % de la TPS/TVH payée sur les frais généraux et indirects, au motif que ses produits d’assurance étaient partiellement liés à des risques habituellement situés à l’étranger et étaient donc partiellement détaxés en vertu de l’alinéa 2 d) de la partie IX de l’annexe VI de la LTA. Le pourcentage de recouvrement des CTI était basé sur le coût historique des réclamations que le contribuable devait payer pour des événements survenus aux É.-U., comparativement au coût total des réclamations pour des événements survenus aux É.-U. et au Canada.
Le ministre du Revenu national (le ministre) a rejeté les demandes de CTI du contribuable au motif que toutes les fournitures du contribuable étaient des fournitures exonérées (la fourniture d’une police d’assurance est généralement une fourniture exonérée et ne donne donc pas droit à des CTI) et le contribuable a fait appel de cette évaluation.
Dans l’affaire Société d’assurance des entreprises Northbridge c. La Reine, 2020 CCI 132, la CCI a rejeté l’appel du contribuable :
Le contribuable a fait appel de la décision de la CCI.
Dans Société d’assurance des entreprises Northbridge c. Le Roi, 2023 CAF 211, la CAF s’est prononcée en faveur du contribuable et a estimé qu’aux fins de l’alinéa 2(1)d) de la partie IX de l’annexe VI de la LTA, la référence à l’endroit où le « risque » est habituellement situé se rapporte au lieu où les événements qui donneraient lieu à la réclamation sont situés (par opposition au lieu où les objets qui font l’objet de l’assurance sont habituellement situés). Ainsi, dans la mesure où les événements (par exemple les accidents de transport routier) qui donnent lieu à une réclamation peuvent se produire à l’extérieur du Canada, une partie de l’assurance sera admissible à la détaxation.
La CAF a également fait remarquer que la tarification des polices d’assurance du contribuable serait pertinente pour déterminer la mesure dans laquelle elles se rapportent à des risques habituellement situés à l’étranger (c.-à-d. des prix plus élevés pour des polices avec une couverture à l’extérieur du Canada). Compte tenu de cette interprétation, la CAF a renvoyé l’affaire à la CCI pour qu’elle détermine le montant du CTI que le contribuable pouvait demander.
Dans l’affaire Société d’assurance des entreprises Northbridge c. Le Roi, 2024 CCI 10, la CCI a rejeté l’appel du contribuable, en notant que toutes les preuves présentées au procès étaient des « preuves globales » et non des éléments de preuve précis concernant des polices individuelles. La CCI n’a trouvé aucune preuve pour justifier la tarification de chaque police d’assurance qui aurait permis à la Cour de déterminer la partie des primes qui était détaxée. Le contribuable a fait appel de la décision de la CCI.
Dans l’affaire Société d’assurance des entreprises Northbridge c. Le Roi, 2025 CAF 83, la CAF s’est à nouveau prononcée en faveur du contribuable, en concluant que les preuves globales sur la manière dont les polices étaient tarifées étaient suffisantes pour déterminer les CTI du contribuable. Pour parvenir à cette conclusion, la CAF a noté qu’un CTI est basé sur les deux éléments suivants :
Pour les dépenses qui ne sont pas engagées pour une fourniture particulière (p. ex., les biens et services qui sont consommés ou utilisés en relation avec toutes les polices d’assurance établies par le contribuable), la CAF a soutenu que :
La CAF a jugé que le contribuable effectuait des fournitures d’assurance détaxées et, pour la deuxième fois, l’affaire a été renvoyée à la CCI pour déterminer le montant des CTI que le contribuable aurait le droit de demander, conformément aux règles d’attribution des CTI énoncées à l’article 141.02 de la LTA.
Les règles d’attribution dépendent en partie de la question de savoir si les biens et services acquis par le contribuable sont des « intrants directs » ou des « intrants non attribuables ». Les règles exigent qu’une institution financière (IF) classe d’abord ses dépenses dans les quatre catégories suivantes :
Après avoir classé les dépenses, l’IF doit appliquer une méthode d’attribution des CTI. Pour déterminer la mesure d’utilisation et la mesure d’acquisition d’un intrant particulier, l’IF doit utiliser :
Ces deux méthodes sont définies de manière à garantir qu’elles sont conformes aux critères, règles, termes et conditions spécifiés par le ministre. Par conséquent, les IF sont tenues de déterminer leurs CTI d’une manière jugée appropriée par l’Agence du revenu du Canada, sur la base de ses politiques administratives. L’IF doit également déterminer ses méthodes d’attribution des CTI à l’avance et avant la date limite de production de ses déclarations de TPS/TVH.
Ces affaires sont importantes pour les contribuables qui assurent des objets situés à la fois au Canada et à l’étranger. La CAF fournit des indications utiles aux assureurs pour déterminer si leurs fournitures sont exonérées ou détaxées, ainsi que la méthode de calcul des CTI pour les dépenses connexes. À la lumière des décisions de la CAF, les assureurs devraient évaluer leur admissibilité aux CTI, en fonction de l’emplacement du risque et de la mesure dans laquelle il est admissible à la détaxation, et justifier ces évaluations. Nos spécialistes de PwC peuvent vous guider et vous aider dans ce processus.