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Cette deuxième vague a été différente de l’année dernière puisqu’on connaissait mieux la menace que représente le virus et les mesures à mettre en place pour atténuer les impacts collatéraux de la pandémie. Le coût du premier confinement de 2020 était estimé à Rs 35 milliards pour une durée de 10 semaines et je pense que l’effet de ce deuxième confinement sera un peu moins important (vu que nous avons mieux géré la situation cette fois-ci).
Malgré cela, il ne faut pas oublier que le pays subit l’impact combiné de ces deux confinements, et la perte de confiance des entreprises aura, à mon avis, un effet significatif sur la reprise. Les indicateurs économiques sont dans le rouge et le pays est au bout du rouleau. Avec les nouvelles vagues, restrictions et variants à travers le monde, les entreprises restent pessimistes quant à une fin de la pandémie avant 2022. Du coup, les prévisions de la croissance économique pour 2021 devront être révisées à la baisse et je pense qu’on tournerait à moins de 5%.
Les budgets de ces dernières années ont porté sur les projets d’infrastructure ainsi que diverses micro-mesures pour stimuler l’économie. Je lisais récemment que le gouvernement comptait lancer un projet immobilier à Côte d’Or... mais avons-nous besoin encore de bâtiments avec toutes les smart cities qui sont déjà en cours ?
Je pense que le gouvernement devrait se recentrer sur les activités essentielles d’une fonction publique et, avec une marge de manœuvre limitée, il faudrait privilégier une meilleure allocation des ressources publiques et éviter les gaspillages. Il faut se poser la question : qu’avons-nous besoin en ce moment de crise ? Encore plus de projets d’infrastructures, de fonctionnaires ou de pension ?
Il faudrait privilégier une meilleure allocation des ressources publiques et éviter les gaspillages.
A mon avis, il faudrait prendre des mesures courageuses pour renforcer la compétitivité de l’économie, redynamiser les institutions publiques et encourager l’entrepreneuriat. Les PME représentent 55% de l’emploi et doivent faire partie de la solution.
Économiquement, le pays souffre d’un coût élevé de production et d’un manque de productivité. Le volume des importations de produits alimentaires dépasse les 80 % de ce que nous consommons à Maurice et il y a donc un marché potentiel à exploiter.
Malgré les mesures de soutien en termes de subventions, les marges préférentielles pour les contrats de marché public et incitations fiscales, la production locale reste insuffisante. Avec un budget restreint, le gouvernement devrait cibler les subventions ainsi que les produits forts en valeur ajoutée et respectueux de l’environnement.
Le ciblage permettrait une meilleure allocation de ressources publiques, avec le même argent. On devrait encourager la création des usines de transformation écologique de produits issus des ressources locales, et il faudrait plutôt inciter les entreprises locales à se moderniser et se rendre plus compétitifs.
Pour dynamiser une consommation locale, je pense que le gouvernement pourrait adopter un concept de ‘Mauritius reboot’ et supprimer ou appliquer une TVA réduite sur les produits fabriqués localement. L’effet multiplicateur de cette mesure compensera largement le manque à gagner en TVA et entraînera plus de production, de revenu et d’emploi.
Le PIB a connu une décroissance d’environ 15% en 2020 et, tenant en compte du ratio des recettes fiscales par rapport au PIB, je m’attends à une réduction de 10% des recettes fiscales de l’Etat. La crise va accentuer le déficit budgétaire et la tentation sera d’utiliser le levier fiscal pour réduire le déficit.
De manière générale, la tendance mondiale pousse vers une hausse du taux d’imposition. Les Etats-Unis ainsi que le Royaume Uni comptent augmenter les taux d’impôts, mais il faut faire attention avant de nous comparer à ces pays développés : nous n’avons pas de marché intérieur suffisamment large pour soutenir une croissance durable à long terme, et notre attractivité à l'échelle mondiale dépend de notre réputation, notre écosystème et d’une fiscalité légère.
La fiscalité est un élément important à prendre en compte dans une période de crise et devrait avoir comme objectif de stabiliser et stimuler l’économie. La fiscalité doit relancer l’activité économique en modifiant les comportements des agents économiques au moyen des incitations proposées. Une hausse du taux d’imposition aura un effet contraire.
La fiscalité est un élément important à prendre en compte dans une période de crise et devrait avoir comme objectif de stabiliser et stimuler l’économie.
Pour faire face à cette crise économique sans précédent, tous les gouvernements à travers le monde ont déployé de nombreuses mesures d’urgence. Je pense que notre gouvernement n’avait pas le choix. Pour moi, la mise en place d’un mécanisme de soutien n’est pas nécessairement problématique en elle-même, mais c’est plutôt la gouvernance, la transparence et la responsabilisation autour de ce mécanisme qui m’inquiètent. Par conséquent, le rapport du FMI ne m’étonne pas et j’avais déjà tiré la sonnette d’alarme lors de la création du MIC.
Les plans de soutien, comme proposés par le MIC, peuvent fausser l'équilibre économique des entreprises et le danger, c’est qu’une fois la somme dépensée, celles-ci se retrouvent à nouveau dans une situation difficile. Il n’est jamais évident de décider de la viabilité d’une entreprise, particulièrement au vu des changements économiques structurels engagés par la pandémie.
Dans un premier temps, l’objectif du gouvernement a été la préservation de l’emploi et l’évitement de faillites en cascade. En cette deuxième année de pandémie, je pense que les autorités doivent cibler les entreprises les mieux placées pour favoriser une reprise axée sur la productivité, tout en garantissant un redressement plus résilient, et avec une restructuration de dettes, permettant d’éviter une vague de cessations de paiement. Il faut faire attention à ne pas soutenir involontairement des entreprises qui avaient déjà des problèmes de viabilité avant la crise.
En début d’année, j’étais plus optimiste de par l’introduction des programmes de vaccination à travers le monde. Mais, aujourd’hui, avec les nouveaux variants du virus, confinement et déconfinement, je pense que cette crise va être plus longue que tout ce que nous aurions pu imaginer ! Une chose est sûre, le monde n’est plus le même et la reprise sera définie par la demande et les nouvelles attentes des voyageurs.
Pour que la demande de transport aérien augmente, il faudra que les passagers se sentent en sécurité. A Maurice, l’objectif fixé par le gouvernement est d’atteindre l’immunité collective de 60% à travers une vaccination de masse; mais l’accès aux vaccins, ainsi que la volonté de la population à se faire vacciner, freine le programme et recule l‘échéance.
Une réouverture des frontières de manière durable nécessitera non seulement un programme de vaccination accéléré, mais aussi un changement dans notre mode de vie : il faudrait éduquer nos citoyens à apprendre à vivre avec le COVID-19.
Le COVID-19 a durement frappé l’écosystème de l’aviation et les compagnies aériennes en ont fait les frais. De manière générale, l’aviation est à forte intensité de capital mais à faible rendement sur l’investissement, et les derniers échanges parlementaires indiquent une nécessité d’injecter Rs 9 milliards pour sauver Air Mauritius.
La connectivité aérienne est une nécessité et un outil stratégique important pour tout petit état insulaire en développement comme l'île Maurice. Mais à quel coût ?
A un moment où les compteurs sont remis à zéro, il est temps de revoir le modèle économique d’Air Mauritius en termes de stratégie, gouvernance, et opération pour s’assurer qu’elle soit plus compétitive, financièrement durable et résiliente à long terme.
Dans ce contexte, je pense qu’il faudrait conclure des alliances stratégiques et renforcer notre positionnement régional afin d'éviter les chevauchements et l'inefficacité. Les prévisions de reprise du trafic aérien restent sombres et il est impératif de contenir les coûts opérationnels.
Depuis l’introduction du Wage Assistance Scheme (WAS) (de mars 2020 à ce jour), un montant d’environ Rs 15 milliards a été déboursé. Cette assistance financière est aujourd’hui principalement accordée aux opérateurs du secteur du tourisme et, pour le moment, les entreprises ne peuvent licencier jusqu’au 30 juin 2021. Entre les mois de mars 2020 à février 2021, le pays a enregistré environ 9,000 cas de licenciements et, selon les dernières statistiques, le nombre de chômeurs s'élevait à 52,000 en 2020.
A mon avis, le WAS masque la réalité et ce sera difficile d’éviter une vague de licenciements, malgré un déconfinement, puisque je m’attends à une reprise lente avec le dépistage sporadique des cas de COVID qui continuera. Il faudrait laisser les entreprises évaluer la situation, assumer les risques d’un marché libre, et prendre des décisions tenant en compte les perspectives économiques futures.
Le rôle du gouvernement sera ensuite de mettre en place des mécanismes de soutien aux licenciés (allocation de chômage partiel, formation, entreprenariat, etc).
Les indicateurs économiques se sont détériorés sous l’effet de la pandémie en 2020 et il n’y a pas mille façons de s’en sortir : soit on augmente le PIB à travers la croissance, soit on contient les coûts. Les deux ne s'excluent pas mutuellement mais se recoupent et sont complémentaires.
J’ai déjà discuté plus haut des mesures de relance, ainsi que du besoin d’éviter le gaspillage et de se recentrer sur l’essentiel d’une fonction publique. Tout cela aidera à améliorer ces indicateurs économiques et il nous faut apporter un réel changement, des mesures courageuses, structurelles et durables. Il faut faire attention, en cette période de crise, d’utiliser les effets techniques de ‘window dressing’ pour cacher le vrai bilan de notre économie.
La prospérité de notre pays dépend de notre attractivité à l’échelle internationale et la bonne gouvernance est un outil stratégique important de développement. La bonne gouvernance, c’est quoi ? Le respect des droits humains, le contrôle de la corruption, la transparence de l’action publique et le fonctionnement d’un marché libre. Ils sont tous essentiels pour un développement durable. La gouvernance assure un niveau de confiance, un système de régulation fiable, et lié à la croissance économique.
La bonne gouvernance est un élément important pour la réputation et l'image du pays.
Les investisseurs internationaux font de la ‘bonne gouvernance’ un critère majeur de localisation de leurs investissements. Prenons du recul : il est important que le gouvernement revoit le fonctionnement des institutions publiques et prenne les actions nécessaires.